
Dans la Sonate pour flûte, alto et harpe, Debussy réinvente la sonate en trio de « nos vieux maîtres les clavecinistes »... une belle harpe y remplaçant l'industrieux clavecin.
À l'automne 1915, l'auteur de Hommage à Rameau, se réconciliant avec le mot sonate, en prévoyait six. Cent ans après, cette musique venue d'ailleurs subjugue toujours.
Évoquant une sorte de paradis perdu, Debussy, musicien français, ose une pastorale, invite le fantôme aimable de quelque danse de cour, alterne comme Couperin l'humide mélancolie et la chaude lumière de l'été. Debussy orchestre comme personne la harpe et la flûte, son intuition lui faisant préférer (au violoncelle) l'alto, souvent ensourdiné, plus compatible avec la fragilité du son flûté. Prodige de douceur caressante, cette œuvre mythique cache sa construction avec pudeur et naturel. Elle défie l'analyse, évidemment. Alain Louvier, qui écrivit en 1986 Envols d'écailles pour la même formation, propose, dans ce concert-lecture, plus un regard qu'une analyse.