
Mélanie Laurent
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Master 2020Harpe
Née dans une famille de musiciens et formée à Toulouse auprès de Dominique Piussan, puis de Ghislaine Petit et d’Isabelle Moretti au CRR et au CNSMD de Paris, Mélanie Laurent est la Médaille d’Or de l’USA International Harp Competition 2019, l’un des concours de harpe les plus prestigieux du monde. Elle a également remporté le Premier Prix du Concours de harpe Léopold Bellan en 2017. Par sa virtuosité et sa sonorité riche et sensible, elle a charmé le public américain, selon le Harp Column Magazine, qui vante son « toucher d’or ». Pour la saison 2020-2021, elle se produira en récitals solo à Milan, Turin, Hong Kong, Pékin, Shanghai, Xi’an, Chicago, Indianapolis et Bloomington. Mélanie Laurent est lauréate de la Fondation Banque Populaire.
Georg Friedrich Haendel,
Suite pour clavecin n° 7 en sol mineur, HWV 432
Mikhail Mchedelov,
Variations sur un thème de Paganini
Isaac Albéniz,
Asturias (Leyenda)
Johannes Brahms,
Intermezzo n° 2 en la majeur, op. 118
Maurice Ravel,
Introduction et Allegro pour harpe, flûte, clarinette et quatuor à cordes
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Cinq pièces, cinq sons
Ce programme d’ordre chronologique a été conçu de manière à traverser les siècles et les différents pays d’Europe ayant marqué l’histoire de la musique, de l’ère baroque à l’ère moderne. C’est un voyage accessible à tous qui a pour vocation de sensibiliser l’oreille du public aux caractéristiques d’un style, d’une époque, et d’un pays. De l’Angleterre, terre d’adoption de Haendel, à la France impressionniste de Ravel, nous découvrirons ensemble la virtuosité italienne de Paganini, la fougue espagnole d’Albéniz et le romantisme allemand de Brahms.
Mais bien au-delà de ce périple initiatique, mon dessein sous-jacent est de sortir des sentiers battus du répertoire de la harpe et d’offrir un aperçu des possibilités infinies de cet instrument encore trop méconnu. En effet, l’essentiel des pièces écrites originalement pour harpe provient de compositeurs eux-mêmes harpistes (Hasselmans, Tournier, Grandjany…), dont les styles sont très similaires. En privilégiant les grands arpèges consonants et en évitant les difficultés techniques liées à la facture instrumentale, ces œuvres contribuent peut-être à donner à la harpe l’image d’un instrument limité, ne pouvant jouer que dans un seul registre. Ce préjugé a longtemps été combattu, notamment par Henriette Renié, qui a entrepris un grand travail de composition mais aussi de transcription pour démontrer la pluralité et la richesse de l’instrument.
Par le biais de ce récital, je souhaite poursuivre cet engagement, notamment au travers de mes propres transcriptions de Haendel, Albéniz et Brahms. Grâce à la diversité des pièces, la harpe se fait tantôt clavecin, violon, guitare, piano et enfin, termine avec sa propre identité dans Ravel, comme pour la revendiquer davantage. Cinq pièces, cinq sons. En effet, selon la prise de corde, la hauteur à laquelle elle est pincée, l’intention musicale et l’articulation, le timbre de la harpe se façonne et peut revêtir les atours de nombreux autres instruments à cordes, dans un jeu d’imitation.
Toujours dans l’intention de valoriser la harpe sous tous ses aspects, le choix de conclure par l’Introduction et Allegro n’est pas anodin. Cette pièce a indubitablement joué un rôle crucial dans la perpétuation de sa facture instrumentale. Voici le bref récit de cette mission de sauvetage : en 1894, Pleyel invente une harpe chromatique sans pédales, pour laquelle Debussy compose ses fameuses Danse sacrée et danse profane en 1904. Pour répliquer et défendre la harpe diatonique menacée d’extinction par ce nouveau système, Ravel compose alors cette magnifique pièce à la demande du facteur Érard, en 1905. En vue de promouvoir l’instrument, il explore un très large éventail de sons de la harpe et déploie de nombreux procédés d’écriture pour rendre compte de toute sa splendeur, nous livrant un véritable chef-d’œuvre devenu incontournable.. La rivalité entre les deux facteurs prend fin au début de la Première Guerre mondiale, la harpe chromatique tombant progressivement dans l’oubli en raison de son manque de projection sonore et des difficultés pour accorder l’instrument.
C’est l’apologie de mon instrument qui se trame à travers ce programme, grâce à sa diversité, ses jeux de timbres, et sa signification symbolique. Françoise des Varennes écrit au sujet d’Henriette Renié : « Elle avait un tel amour de la harpe que son plus grand désir était de la faire aimer aux autres. » C’est aussi ma devise. La harpe, bien que mieux considérée qu’auparavant, peut encore accéder à une meilleure reconnaissance, et il me tient à cœur de contribuer à cette évolution.