Alban Berg, Vier Stücke op. 5
Bastien Dollinger, piano
Lauriane Maudry, clarinette
Germination Invisible – Beethoven, Brahms, Berg et Widmann
Au milieu du XXe siècle, dans son ouvrage Fondements de la composition musicale, Schoenberg compare le « développement par variation » au phénomène de la germination d’une plante tel qu’il était décrit par Goethe un siècle plus tôt. D’après ce dernier, ce qui peut définir la métamorphose des plantes, c’est « la parenté secrète des différentes parties externes de la plante, à savoir des feuilles, du calice, de la corolle, des étamines, qui se forment successivement et comme naissant les unes des autres ».
À l’image de cette métamorphose, la technique de la variation développante, qui consiste à développer à partir d’un motif de base, « de la germe », toute une ramification de motifs variés, à la parenté parfois dissimulée, permet de construire un discours musical en perpétuel renouvellement, évitant la monotonie d’une simple répétition, mais structuré par une puissante architecture thématique.
L’utilisation de cette technique, théorisée et enseignée par Schoenberg à son élève Berg, est constamment présente dans les sonates et symphonies de Beethoven puis Brahms. Aujourd’hui le compositeur-clarinettiste allemand Jörg Widmann – qui a justement signé récemment comme interprète un magnifique enregistrement des deux Sonates op. 120 de Brahms pour clarinette et piano, avec son ami Andras Schiff, et dont la musique s’inscrit directement dans cet tradition germanique de la variation développante – apporte avec ses Fünf Bruchstücke pour clarinette et piano une proposition contemporaine et personnelle de l’emploi de cette technique. Le compositeur lui-même dira de cette œuvre qu’elle « n’aurait pas pu exister sans l’existence des 4 Pièces op. 5 pour clarinette et piano de Berg », qu’il joue aussi très souvent en concert.
La filiation est en définitive toute tracée entre Beethoven, Brahms, Berg et Widmann, et l’interprétation par le duo l’Orbe de ces quatres œuvres en un même concert propose une expérience dense et immersive permettant la contemplation de ce phénomène de germination de la pensée de Beethoven, depuis la création en 1801 de la cinquième sonate dite « Le Printemps » – transcrite pour clarinette pour ce concert – jusqu’aux Fünf Bruchstücke composées en 1997.
Si l’orbe désigne en photographie des gouttes d’eau ou des grains de poussière apparaissant à la lumière, c’est par ce désir de faire étinceler l’orbe qui se cache dans chaque page musicale que Bastien Dollinger et Lauriane Maudry ont donné vie à cette sonata a due.
C’est bien au cœur de leur démarche d'interprète que s’inscrit ce travail de fabrication d’une diversité de nuances de couleurs, sonores ou émotionnelles (à laquelle le piano et la clarinette se prêtent volontiers), prolongé par une définition raffinée de la projection et de l’intensité des éclairages dans l’architecture de chaque œuvre.
La construction et l’engagement de leurs interprétations d'œuvres du vaste corpus pour clarinette et piano, de créations ou encore d’arrangements personnels et inédits, illustre le désir du duo de faire rayonner généreusement une formation de chambre qui suggère habituellement l’intimité. Le duo s’engage aussi dans de nouvelles formes de concerts allant à la rencontre de l’auditeur en créant des projets à géométrie variable, entouré d’une nouvelle génération d’artistes en tout genre.
Le Duo l’Orbe a suivi l'enseignement d'Emmanuelle Bertrand au CNSMD de Paris en Master de musique de chambre au sein duquel ils obtiennent leur prix à l'unanimité avec les félicitations du jury.
Ils ont eu l'occasion de jouer aux Archives Nationales, au Musée de l'Armée des Invalides, à la Maison du Berger, aux Nocturnes de Laudes, au Toit des arts...
Contact : duolorbe@gmail.com