Face à la barbarie par Bruno MANTOVANI, directeur du Conservatoire
Mis à jour le 25 septembre 2019 – Archives
L’attentat perpétré hier contre le journal Charlie Hebdo a profondément bouleversé les élèves, les professeurs et les agents administratifs et techniques du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris. Nous éprouvons tous une peine incommensurable après l’assassinat de ces journalistes, de ces policiers et de ces collaborateurs d’un journal qui a toujours été un espace de liberté et de démocratie. Cet acte barbare et ignoble nous interroge sur les missions d’un établissement comme le Conservatoire de Paris. En formant les danseurs et les musiciens de demain, nous tentons de transmettre aux jeunes générations la beauté, la grandeur, la noblesse, ces valeurs inconnues des fanatiques imbéciles qui ont agi hier. Face à la barbarie, le Conservatoire apparaît comme un refuge, comme un lieu de résistance. Il ne s’agit pas juste de savoir danser, jouer d’un instrument, chanter, mais bien d’affirmer une haute opinion de l’humanité, loin de l’horreur qui a sévi en ce 7 janvier.
Les artistes, notamment quand ils sont pédagogues, ont une responsabilité vis-à-vis du reste de la société. Transmettre permet de sortir de la vacuité et de la désolation. C’est aussi ce qui permet de lutter contre ses propres frustrations, ses propres doutes, voire ses propres névroses. On ne perd jamais rien en donnant aux autres. Alors que quelques groupuscules en veulent à notre démocratie, ces valeurs généreuses sont plus que jamais celles du Conservatoire, d’un Conservatoire ouvert aux autres, tolérant et solidaire.
Aujourd’hui, plus qu’à Noureiev ou à Messiaen, plus qu’à Plisestkaia ou à Ravel, c’est à Charb, à Cabu, à Wolinski et à leurs amis que nous pensons. Nous partageons avec ces artistes une éthique, une exigence, un désir de liberté. Leur mort injuste fait que plus rien ne sera jamais comme avant pour tout artiste. Les élèves du Conservatoire leur rendront hommage dans les prochaines semaines lors d’un concert qui sera un moment de recueillement et de résistance.
Bruno MANTOVANI
Directeur du Conservatoire