Artist Diploma Interprétation – Création : un nouveau cursus unique en Europe en partenariat avec l’Ensemble Intercontemporain
Mis à jour le 16 mars 2022
Clément CARPENTIER, chef du département des disciplines instrumentales au Conservatoire de Paris, Hae-Sun KANG, enseignante au Conservatoire de Paris et soliste à l’Ensemble Intercontemporain, Olivier LEYMARIE, directeur général de l’Ensemble Intercontemporain et Pia Galloro, responsable de l'action culturelle de l’Ensemble Intercontemporain présentent dans cet entretien ce cursus inédit pensé autour d’un collectif appelé Ensemble NEXT.
De quel besoin est né ARTIST DIPLOMA ?
Clément : Le Conservatoire de Paris propose actuellement un cursus de 3e cycle post-master intitulé Diplôme d’artiste interprète répertoire contemporain et création structuré autour de partenariats, notamment avec l’Ensemble Intercontemporain (EIC), partenaire déjà important de ce cursus. Après onze ans de fonctionnement, il nous a semblé essentiel de repenser ce cursus afin de proposer une formation plus en connexion avec l’EIC, mais aussi plus ancrée dans la réalité du monde professionnel, tout en lui donnant une visibilité beaucoup plus internationale.
Olivier : De notre côté, nous avions le sentiment que la place de la musique contemporaine à Paris avait besoin d’un nouvel élan, c’est pourquoi nous avons travaillé au renforcement de la collaboration déjà existante entre le Conservatoire de Paris et l’Ensemble Intercontemporain.
Tant pour le Conservatoire que pour l’EIC, la pédagogie et la transmission des savoirs est un axe majeur. L’objectif était donc d’étendre le dispositif existant, mais aussi de stabiliser un effectif. En effet, le format de sélection du diplôme actuel engendre parfois quelques déséquilibres avec des classes d’instruments disparates. L’idée de créer une nomenclature semblable à celle de l’EIC au sein de ce nouveau cursus est très pratique et efficace.
Pouvez-vous nous décrire cette formation et ses spécificités ?
Clément : Tout d’abord, la dimension de pratique, qu’elle soit soliste, de musique de chambre, ou d’ensemble est essentielle et constitue le cœur de cette formation.
Il nous a également semblé important d’ajouter à cet enseignement pratique un module d’initiation à l’improvisation générative, permettant de comprendre ses liens avec les répertoires de la seconde moitié du XXe siècle et notamment les répertoires électroacoustiques.
Nous avons ensuite fortement renforcé les volets de formation sur les connaissances et la recherche, à travers des modules sur la connaissance des répertoires des XXe et XXIe siècles, des outils de création et d’électroacoustique et de l’écosystème des musiques contemporaines par la rencontre de professionnels telles que les équipes de l’EIC, ou encore des directeurˑrices de festivals d’ensembles. Cette formation comprend d’autre part un travail de recherche collective, dont l’objet est commun à l’ensemble de la promotion.
Les interprètes formés ont des carrières multiples : ils sont solistes, musiciens d’ensemble, enseignants... C’est pourquoi ce cursus comprend un volet de transmission, de formation à la médiation autour des répertoires de la musique contemporaine. Il nous semble essentiel de former ces jeunes interprètes au partage de leurs envies et de leur amour de ces répertoires avec différents publics.
Autre axe de professionnalisation très fort, un travail régulier avec les compositeurs est proposé afin de comprendre les enjeux de création et les mécanismes de formation d’un ensemble, à travers des ateliers ainsi qu’une préparation aux auditions dans les différents ensembles de musique contemporaine.
Enfin, pour la première fois dans l’histoire du Conservatoire, nous associerons à ce cursus unˑe étudiantˑe en formation de réalisateur en informatique musicale. Il ou elle bénéficiera de l’accompagnement pédagogique d’un·e enseignant·e du département des Métiers du son et de l’expertise du réalisateurˑrice en informatique musicale du service audiovisuel du Conservatoire, ainsi que de celle du milieu professionnel à travers des partenariats ponctuels, des institutions, des festivals ou des entreprises partenaires.
Comment percevez-vous l’impact de ce double apport d’expérience et de pédagogie dans l’insertion des étudiantˑes ?
Hae-Sun : C’est une opportunité unique au monde. Ce diplôme est une réelle chance pour les artistes désireux de s’orienter vers la musique contemporaine, puisqu’il constitue un véritable changement dans l’enseignement de ce répertoire. C’est selon moi le cursus le plus complet qui puisse exister, puisqu’à ma connaissance, ce modèle de formation en musique contemporaine n’est proposé nulle part ailleurs. Ici, l’opportunité est double : d’une part par cette collaboration avec l’EIC, mais aussi par cet enrichissement mutuel de nos diverses expériences.
Pia : Avec cette collaboration, l’EIC partage son expérience en mettant les étudiantˑes dans la peau à la fois d’unˑe tuttiste, d’unˑe chambriste et d’unˑe soliste. À ce volet des formations musicales, nous souhaiterions intégrer en deuxième année un volet pluridisciplinaire, puisque nous réalisons de nombreux projets avec des compositeurs mais aussi des artistes extramusicaux.
Ce cursus leur permettra également via le volet médiation de participer à des avant-concerts avec des musicologues, des médiateurs ou bien de s’emparer eux-mêmes d’un programme et d’en faire la médiation. Nombre d’événements se déroulent à la Philharmonie de Paris, lieu de résidence de l’EIC, mais aussi sur l’ensemble de la place parisienne et extra-parisienne via divers projets avec des musées ou des structures culturelles autres que les salles de concerts traditionnelles.
Olivier : Aujourd’hui, l’axe pluridisciplinaire est important puisqu’unˑe jeune musicienˑne joue en scène avec des lumières, de la vidéo, de la danse et aborde la médiation à un moment donné de sa vie, domaine qui peut également s’avérer être un axe de reconversion en fin de carrière.
Les moments de rencontre avec les solistes et les équipes de l’EIC permettront d’échanger, de sentir comment évolue un ensemble de musique contemporaine et donc d’appréhender ce que pourrait être leur vie au sein d’un ensemble. L’objectif est également de faire réfléchir : par cette proximité, nous aurons l’opportunité de partager aux étudiantˑes les questionnements qui peuvent nous habiter, nous traverser au quotidien. Car au-delà de la pratique instrumentale, c’est également une formation de l’esprit.
À quel public cette formation est-elle destinée et quels sont les profils que vous ciblez ?
Clément : Cette formation s’adresse à des interprètes déjà diplômés d’un master d’instrument d’une école française ou internationale, déjà extrêmement à l’aise sur leur instrument et qui ont un goût particulier pour les répertoires des XXe et XXIe siècles, la création et le répertoire contemporain.
Ces artistes doivent également témoigner d’un intérêt pour l’inventivité et le travail collectif, puisque nous avons pensé ce cursus en termes de promotion, de collectif qui se matérialisera dans l’Ensemble NEXT. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle cette formation se déroule sur deux ans, avec un concours tous les deux ans également, afin d’accompagner au mieux ce collectif.
Nous retiendrons les candidats curieux, désireux d’aborder diverses réflexions et questionnements et surtout de s’investir dans un collectif. Cet aspect nous parait important puisqu’il coïncide avec les valeurs que nous souhaitons porter au Conservatoire et que nous partageons avec l’EIC.
Quel conseil donneriez-vous aux candidats ?
Hae-Sun : Soyez prêts à travailler ! Collaborer sur certaines créations avec des compositeurs est une expérience très formatrice, qui implique un travail approfondi dans des délais parfois extrêmement restreints. C’est une expérience que les étudiants de ce cursus pourront vivre et qui les préparera pleinement à ce qui les attend dans leur carrière professionnelle.
Olivier : En effet, la notion de travail est importante car elle correspond à la réalité de la vie d’un ensemble.
Comment se déroule le concours d’entrée ?
Clément : Le concours d’entrée débute par une phase d’admissibilité, avec une présélection sur vidéo. Les candidats doivent enregistrer 15 minutes de musique « avant 1945 » (ce qui laisse la liberté depuis le baroque jusqu’au premier XXe siècle) et 15 minutes de musique « après 1945 », dans laquelle ils doivent choisir une œuvre dans la liste publiée sur le site (ou équivalent). Cette vidéo peut être tournée exclusivement pour le concours ou avoir été captée à l’occasion d’un concert ou d’un enregistrement. Celle-ci doit démontrer la maitrise de l’instrument et la capacité d’interprétation des différents répertoires.
Cette première phase interviendra en amont des congés d’été et sera suivie d’une phase d’admission début septembre, avec une seconde série d’épreuves :
- L’interprétation d’une pièce du répertoire de la seconde moitié du XXe ou du XXIe siècle (sans électronique) ;
- Un trait d’orchestre avec mise en loge que les candidats découvriront sur place, suivi d’un bref travail avec le jury afin de déterminer la capacité de réactivité du candidat ;
- Une épreuve collective semi-dirigée sous le format d’un cours de 30 minutes dans lequel le jury observera notamment les interactions entre les différents candidats et leur capacité à interagir, à être force de proposition ;
- Un entretien avec le jury pour lequel nous encourageons les candidats à bien se préparer : la présentation des motivations et du projet professionnel du candidat constituera une étape importante dans ce processus mais permettra également au jury d’analyser la capacité de réflexivité des candidats face à leurs épreuves durant le concours.
Quelles sont les voies d’insertion professionnelle envisageables à l’issue d’une formation comme celle-ci en partenariat avec l’EIC ?
Olivier : Bénéficier de cette formation par le Conservatoire de Paris tout en étant au contact des solistes de l’EIC constitue une préparation essentielle pour réussir les différents concours de recrutement et ceux de l’Ensemble Intercontemporain notamment, mais aussi pour intégrer d’autres ensembles ou mener une carrière de soliste. Cette formation est pensée pour ouvrir toutes les portes, tout particulièrement dans le domaine de la musique contemporaine mais aussi à plus large échelle.
Hae-Sun : En effet, plusieurs étudiantˑes de ce diplôme intègrent des orchestres symphoniques par la suite, tout en réalisant régulièrement des projets contemporains. Ces deux ans d’études sont autant d’expériences très importantes qui permettent de se construire et de construire des projets ensemble, et qui constituent une formidable ouverture.
Clément : Nous avons pensé un cursus le plus complet possible dans le but de former des interprètes solides et autonomes dans leurs pratiques, au fait des outils à leur disposition, de l‘environnement professionnel qui s’offre à eux. L’idée est de leur fournir une plateforme de tremplin et de rencontres à partir desquelles ils pourront construire le réseau professionnel des prochaines années de leurs carrières.
Pour en savoir plus sur les disciplines enseignées et les conditions d’entrée, rendez-vous sur la page dédiée de la formation :
https://www.conservatoiredeparis.fr/fr/cursus/artist-diploma-interpretation-creation