Hommage à Jean-Claude Raynaud
Mis à jour le 23 novembre 2021
C’est une bien triste nouvelle que nous venons d’apprendre. Jean-Claude Raynaud, qui fut professeur d’harmonie au Conservatoire pendant 30 ans, est décédé il y a quelques jours à l’âge de 84 ans. Olivier Latry, professeur d’orgue au Conservatoire et l’un de ses anciens élèves, lui rend hommage.
« Pour la plupart de ses élèves, la disparition de Jean-Claude Raynaud nous donne l’amer sentiment d’être orphelins...
D’un naturel discret, pour ne pas dire timide, Jean-Claude savait malgré tout déceler chez chacun d’entre nous le bourgeon qui ne demandait qu’à éclore, et ses conseils avisés, toujours personnalisés, nous traçaient la voie pour y parvenir.
Qui ne se souvient de sa prodigieuse habilité à déchiffrer tout ce qu’on lui mettait sur le pupitre ? Nous n’assistions pas alors à un cours d’harmonie, mais à une réelle performance « musicale », car tout était là : les notes, bien sûr, mais aussi le toucher pianistique, la sonorité orchestrale si cela s’avérait nécessaire, l’expression, les nuances, le rubato... le tout sur un texte que, lorsqu’il s’agissait d’un devoir d’élève, il découvrait en même temps que nous !
Il n’était pas rare que s’y ajoute une expression faciale ou corporelle pour signaler une maladresse harmonique, un contresens musical ou une énormité stylistique ; le tout pouvait d’ailleurs parfois s’accompagner d’une réflexion « piquante » que nous redoutions tous... Mais une compilation de ces réflexions, dont certaines résonnent encore dans notre mémoire, nous donnerait une juste réalité de la subtilité de son humour.
Pour la plupart d’entre nous, un passage dans sa classe était synonyme de découverte d’un monde que nous ignorions, l’ouverture sur le parangon musical. Que de musiques nous avons entendues pour la première fois grâce à lui !
Il a su nous dévoiler l’essence même de la musique, nous faisant percevoir les évidences qui étaient pourtant là sous nos yeux. Dans ce cas, il avait encore recours à une expression faciale qui mettait l’accent sur la beauté ou la nécessité d’une modulation, l’arrivée d’un contresujet, et nous ouvrait la porte à ce que je qualifierais de « miracle musical », de ce qui hisse un morceau en chef-d’œuvre.
De ces séances de cinq heures où nous avions tant découvert, nous sortions tous émerveillés, remplis d’un incroyable sentiment de béatitude. Il y a presque quarante ans que j’ai eu l’occasion de bénéficier de son enseignement, mais les souvenirs de chacun de ces instants demeurent vivaces. Tout comme pour mes condisciples, ils resteront gravés dans nos mémoires.
Merci Jean-Claude. »
Photo : Classe de fugue de Noël Gallon au CNSM de Paris, 1961. Debout, 1er rang, de gauche à droite : Marie-Claire Laroche (4e), Thérèse Brenet (5e), Francine Guiberteau (6e), Françoise Gumpel-Rieunier (8e), Jean-Claude Raynaud (9e). Debout, 2ème rang, de gauche à droite : Tôn-Thât Tiêt (1er), Jean-Paul Rieunier (4e), Alain Roizemblat (6e). L'identité des autres élèves est inconnue.
( coll. Thérèse Brenet )